Juste pour vous faire découvrir le sujet , histoire tiré du Livre "Trop loin de Berlin" ecrit par Caraline Bergeron , histoire de prisonnier Allemand au Canada.
À quelques 50 kilomètres de Louiseville, la St. Lawrence Paper exploite un camp forestier dans le secteur que l'on appelle Les Pins rouges. Comme d'autres entreprises, elle a décidé d'embaucher des prisonniers allemands dans ses chantiers. C'est ainsi qu'à la fin de 1943 et au début de 1944 un groupe de soldats allemands, détenus auparavant dans le camp de Monteith en Ontario, arrivent dans cette région de la Mauricie.
Maurice Savard, lui aussi travailleur forestier de Saint-Alexis, eut l'occasion de discuter à quelques reprises avec les prisonniers allemands du camp de la St.Lawrence :
"Les jeunes prisonniers n'étaient pas parlables. Les plus vieux avec qui je discutais me disaient : «Ne prononce pas le mot Hitler près des jeunes, car ils sont très pointilleux là-dessus. Ce sont des fanatiques. Ils sont suspicieux. Ils ont même des doutes sur nous autres, les plus vieux quant à notre fidélité à l'Allemagne.»
L'un d'entre eux, qui était médecin je crois, me dit un jour : «Comprenez-vous pourquoi de grandes civilisations comme les nôtres en soient rendues là ?»
J'ai répondu que cette guerre était une chicane de grands boss. Hitler comme Mackenzie King et Churchill.
Le dimanche, ils avaient la permission de sortir du camp en compagnie des gardes. Ils étaient habillés avec leurs uniformes de sous-mariniers, des vêtements très légers, peu adéquats pour la température de notre coin. Ils n'avaient pas le droit d'entrer au village ou d'arrêter chez les civils. Je me souviens particulièrement d'un de ces jeunes prisonniers. Il était très militant. Je l'avais surnommé le petit Hitler. Il parlait toujours avec vigueur, avec conviction à ses camarades. Un jour, alors qu'il était dans un camion, parlant avec enthousiasme avec ses camarades, il prononça le mot Canada. Je ne comprenais pas ce qu'il disait, mais le Bavarois avec qui je m'entendais bien, m'en fit la traduction.
Le jeune Allemand parlait en fait de l'avenir du Canada au sein du IIIe Reich. Il discutait du défi qui attendait l'Allemagne pour gérer un si vaste territoire. Ils étaient vraiment convaincus de la victoire de l'Allemagne dans cette guerre."
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Dans la meme lignée que l'histoire précédente
Joseph Bellemare est à l'époque au service de la St. Lawrence :
"Ils sont arrivés au début de janvier à la gare de Louiseville. C'est là que nous sommes allés les chercher pour les conduire au camp forestier des Pins rouges à Saint-Alexis. La compagnie les utilisait comme bûcherons. Moi, j'étais à ce moment-là commis au camp.
Tous les matins, vers 7h30, ils se dirigaient vers la forêt, escortés de cinq gardes-vétérans. La journée de travail se prolongeait jusqu'à 16h.
Je dois vous dire une chose, ce n'étaient pas de grands bûcheux. Ils ne connaissaient pas ça. Malgré leurs efforts et nos conseils, les cordes de bois ne s'accumulaient pas rapidement. Certains conduisaient les chevaux et en assumaient l'entretien. Je me souviens que l'écurie était aussi propre qu'une maison privée. Les prisonniers allemands étaient logés dans un grand dortoir. Les douches étaient tout simplement de grands barils remplis d'eau. Les gardiens me disaient que le soir venu, les Allemands s'occupaient en lisant et en étudiant.
Les livres de géographie les intéressaient beaucoup, particulièrement ceux portant sur le Canada. Je me souviens que, comme passe-temps, ils s'étaient fait une jambonnière, une sorte de cabane où ils enfumaient leur viande.
Un jour, l'un de ces Allemands s'évada. On le reprit toutefois peu de temps après. Il fut retourné en Ontario. C'était presque impossible de s'évader. On pouvait certes quitter le camp, mais pour aller où ? C'était la forêt partout et la seule route existante obligeait l'évadé à pénétrer dans les villages. Un étranger, à cette époque, était rapidement repéré. De mémoire, il n'y a pas eu de problèmes majeurs avec ces prisonniers, du moins durant les semaines où j'étais là. Je me souviens cependant avoir remarqué clairement que leur attitude était nettement plus amicale avec les francophones qu'avec les Anglais présents dans le camp. On sentait une sorte de mépris constant lorsqu'un des contremaîtres anglais s'adressait à eux. Avec nous, c'était différent."